05 février 2007

Le risque a disparu !


Le risque a disparu ! C'est bien l'impression que l'on a quand on regarde les marchés ! Plus exactement, c'est la perception du risque qui a beaucoup diminué.
Quelques exemples : l'indice de volatilité implicite, VIX, se situe vers 10% sur les options sur indice SP500 cotées à Chicago sur le CBOE, niveau historiquement très bas; les spreads de crédit, sur les signatures non-investment grade, sont passés en 2006 de 350 à 200 pb, et ont continué à diminuer depuis le début de l'année; l'optimisme des investisseurs institutionnels se situe à un niveau très élevé. Au forum de Davos, les participants ont remarqué très justement la schizophrénie du monde, très bullish sur l'activité économique, et très pessimiste sur la situation géopolitique.
Dans un billet publié par Option Finance la semaine dernière, Patrick Artus faisait remarquer que la corrélation entre les cours de Bourse et les spreads de crédit, si forte jusqu'en 2003, était beaucoup moins nette depuis. Si les cours de Bourse avaient suivi les spreads de crédit, le CAC40 serait aujourd'hui 40% plus haut ! De même, le quotidien La Tribune publiait le 30 janvier un article de Michel Cicurel, le président de la Compagnie Financière, qui détaillait les risques sous jacents à l'optimisme ambiant. Et dans la dernière lettre du Vernimmen, Pascal Quiry rappelait que la valorisation des entreprises chinoises cotées supposait une croissance de leur rentabilité qui est tout sauf acquise.
Très forte liquidité mondiale avec la faiblesse des taux d'intérêt, flux financiers internationaux avec les déficits américains et les excédents chinois, innovations financières sous forme de credit derivatives, CDO et autres securitizations, tout cela forme un environnement où l'investisseur contrariant trouve quelques raisons de s'inquiéter. On peut actuellement acheter de la dette Ford sur 5 ans avec un spread de 500 bp, et couvrir avec un CDS, credit default swap, qui affiche une base négative, permettant donc de reconstituer du taux sans risque, ou supposé tel, avec un rendement supérieur de près de 100 bp au swap 5 ans. Evidemment, en cas de problème, on peut se demander si le hedge fund qui fait la contrepartie sera en mesure de tenir ses engagements...
Rappelons-nous que lors du krach de 1987, l'assurance de portefeuille, qui était supposée protéger contre les situations les plus adverses, n'avait pas pu jouer son rôle, car les actions ne cotant plus, le contrat à terme sur le SP 500 qui lui servait d'instrument d'assurance était décoté de près de 10% par rapport à l'indice théorique : problème de liquidité. En 1998, lors de la faillite de LTCM, c'est aussi le problème de la liquidité sur les marchés qui avait été le plus lancinant, au point qu'il y avait même des spreads importants entre les T-bonds en fonction de leur liquidité !
Le cash disponible sur les marchés peut entrainer les valorisations sur des niveaux incohérents. La valorisation actuellement raisonnable des marchés boursiers occidentaux ne doit pas faire oublier les risques sous jacents. Chaque accident sur les marchés s'accompagne d'une contraction brutale de la liquidité sur les instruments traités; hors, le risque associé à ce phénomène est difficile à évaluer.
The International Risk Analyst a publié le 18 janvier un article très fouillé sur ce thème, sous le titre : Yield to commission : Credit derivatives, moral hazard and systemic risk. Tout un programme !

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