25 octobre 2010

Qui achète la dette publique française ?

Qui achète la dette émise par l'Agence France Trésor, pour le compte de l'Etat ? La lecture du bulletin mensuel publié par l'AFT est très instructive.
On y apprend qu'au 31-12-2008, la dette de l'Etat s'élevait à 1017 milliards d'euros, détenue à 65,1% par des investisseurs non résidents. 20 mois plus tard, au 31-08-2010, la dette avait augmenté de 201 milliards, pour totaliser 1218 milliards, tandis que la proportion détenue par des non résidents était de 70,6 milliards.
Une simple règle de 3 révèle la cruauté des chiffres : entre ces dates, le montant de la dette de l'Etat détenue par des investisseurs non résidents est passé de 662 à 860 milliards, tandis que les investisseurs domestiques investissaient 3 milliards, de 355 à 358 milliards.
En bref, les 200 milliards de dettes supplémentaires accumulées en moins de 2 ans ont été souscrits par des étrangers.
Le phénomène n'est d'ailleurs pas nouveau. Fin 2005, les 877 milliards de dettes étaient détenus à hauteur de 56% par des non résidents, pour 491 milliards, tandis que les Français en possédaient 386 milliards.
On peut se réjouir de l'attractivité de notre dette pour les investisseurs du monde entier. On peut aussi s'inquiéter de la fragilité que cela révèle. Si un matin, le comité d'investissement de la caisse de retraite des fonctionnaires du Wisconsin, par exemple, décide que la rémunération de nos OAT n'est plus suffisante pour compenser le risque, il décidera sans état d'âme de vendre, et ce sera fait en quelques minutes, quelques heures tout au plus.
Il ne s'agit pas ici du AAA décerné par les agences de notation : si elles notaient objectivement, elles nous attribueraient BB, pas AAA. Heureusement que plus personne ne croit à leurs notes.
Le vrai juge de paix, c'est le spread OAT - Bund, c'est-à-dire l'écart de taux d'intérêt entre les obligations d'Etat à 10 ans françaises et allemandes, celui qui clignote en permanence dans le coin de l'écran du Blackberry de Christine Lagarde. Il n'y a pas si longtemps, le spread était proche de 0. il est maintenant à environ 40 points de base = 0,40%. Aujourd'hui, avec le début de la fin du blocage des raffineries et dépôts de carburant, il a baissé à 38. Un ou deux points de base, cela peut sembler peu de chose. Mais étant donné que l'AFT va émettre en 2010 environ 180 milliards d'euros, et autant en 2011, on calcule aisément que 1 pb équivaut à 18 millions d'intérêt en année pleine : pas négligeable !
Une question dérangeante donc : pourquoi les Français n'investissent-ils pas dans la dette émise par leur pays ? Tous nos responsables politiques qui se vantent et se glorifient de "ne pas spéculer en Bourse" feraient bien d'y réfléchir. A mon humble avis, la question reviendra sur le devant de la scène, et de façon brutale, d'ici les élections présidentielles dans 18 mois.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

La question est bonne? Mais pourquoi les français n'achètent-ils pas la dette française?
C'est peut être parce qu'elle n'est pas assez rémunérée et donc nos chères compagnies d'assurances vont chercher du rendement du côtés des PIIGS. D'ailleurs, dans les principaux créanciers des PIIGS, on retrouve ... la France.

Anonyme a dit…

Effectivement le constat est amer et les lendemains seront difficiles; n'oubliez pas que la Bourse est aussi entre les mains des etrangers; l'immobilier à paris le devient progressivement.
Demain ou meme des maintenant les francais subiront les conséquences; l'etat a ses responsabilité dans ces processus : les francais n'ont plus confiance, la donne change trop souvent au gre de nos Enarques de plus en plus eloignés des réalités que nous vivons!

leaderoption a dit…

J'adore ton blog, il y a toujours quelque chose de nouveau à lire! Bonne continuation

fonds de commerce a dit…

C'est juste une question de mal gouvernance.

Solution Credit a dit…

Ca rapporte apparemment d'acheter de la dette française ! Quand je pense que l'on met en place des commissions de surendettement pour les ménages français qui ont pris trop de crédits ! A quand une commission pour l'Etat français ...